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Le 23/01/2019 à 19h

L’avènement de l’aménagement mutualisé

Lorsque l’Etat estime que, sur un territoire donné et au vu du contexte local, une opération d’aménagement s’impose et que les autorités concernées ne mettent pas en place les décisions et moyens destinés à répondre à une telle nécessité, il n’hésite pas à recourir au mécanisme de l’Opération d’intérêt National (OIN) afin de se substituer à ces dernières et prendre des décisions concernant les permis de construire et autres actes liés aux opérations de construction.

L’avènement de l’aménagement mutualisé

Cette méthode, qui peut à juste titre être jugée contraignante voire autoritaire, est progressivement remplacée par des partenariats Etat- structures locales fondés sur le contrat et donc l’accord des volontés. Elle symbolise à la fois le phénomène de contractualisation de l’action publique mais aussi de nouvelles formes de relations au service de l’aménagement local que la récente loi ELAN vient encore d’accélérer.

Une boite à outils enrichie

La loi ELAN du 23 novembre 2018 a ainsi mis en place le Projet partenariat d’Aménagement (PPA), qui est un contrat souscrit entre l’Etat et un établissement de coopération intercommunale. Peuvent aussi être signataires avec l’Etat les établissements publics territoriaux (EPT) relevant du périmètre de la Métropole du Grand Paris, la Ville de Paris, la Métropole de Lyon et des communes membres des EPCI en cause, voire des entreprises publiques locales (SEM, SPL...) et des entreprises implantées dans le périmètre territorial du PPA. En soi, il n’est pas vraiment une nouveauté dès lors qu’existent déjà des outils contractuels quelque peu comparables comme le Contrat d’Intérêt National (CIN) ou le Projet d’Intérêt Majeur (PIM); ces derniers n’ayant pas été supprimés, le risque de superposition entre eux et donc de confusion n’est pas à nier, dans un secteur où la clarté et la simplicité ne sont pas vraiment de mise. La particularité du PPA est cependant, au-delà du large périmètre qu’il offre aux acteurs publics et privés, de donner une place spécifique à l’Etat. A côté de l’aspect conseil et assistance technique aux projets qu’il peut offrir- ou plutôt que les établissements publics d’aménagement qui dépendent de lui peuvent offrir-, sa participation peut se traduire par des apports en foncier, mais aussi sous un angle financier notamment dans des territoires où les structures publiques ont du mal à faire face à des situations urgentes par exemple en termes de manque de logements ou, plus aigu encore, de logements insalubres.

L’avenir appartient aux intercommunalités ?

Si le contrat de PPA le prévoit, une opération qui en fait partie peut, du fait de ses dimensions ou de ses caractéristiques, être qualifiée de Grande Opération d’Urbanisme (GOU-article L.312-3 du code de l’Urbanisme). Dans le cadre de cette GOU, c’est l’établissement public de coopération intercommunale ou l’établissement public territorial ayant souscrit le contrat de PPA qui deviennent les autorités compétentes pour délivrer les permis de construire, d’aménager ou de démolir concernant les projets qui relèvent de son périmètre. Ils deviennent ainsi compétents pour la réalisation, la construction, l’adaptation ou la gestion des équipements publics nécessaires à la GOU et en assurent la maitrise d’ouvrage ; sachant que la GOU permet de bénéficier du permis de déroger crée par l’article 88 de la loi 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine.

La GOU est donc un outil qui donne la part belle aux structures intercommunales, qui y prennent donc en charge les compétences des communes en matière d’urbanisme, mais également celles exercées par l’Etat dans le cadre des fameuses OIN que les GOU sont justement appelées à remplacer.

On glisse donc d’une conception quelque peu autoritaire de l’Etat en matière d’urbanisme et d’aménagement à une prépondérance intercommunale, en passant par une étape de partenariat Etat- structures locales.
Si les acteurs concernés estiment justement que la GOU efface quelque peu ce partenariat qu’ils jugent indispensable, ils peuvent toujours créer une société publique locale d’aménagement d’intérêt national- SPLA-IN, loi 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain et loi ELAN précitée du 23 novembre 2018- qui permet un actionnariat partagé Etat-collectivités locales et/ou EPCI.

Du PPA aux SPLA-IN en passant par les GOU, les nouveaux outils d’aménagement ainsi mis en place privilégient donc la coopération entre les structures locales et nationales intervenant en la matière mais aussi les intercommunalités. Cela permet de s’interroger sur l’avenir de l’échelon communal dans ce domaine, mais aussi sur les capacités humaines, techniques et financières des EPCI pour relever les défis qui se présentent ainsi à eux.

Jean-Marc PEYRICAL
Cabinet Peyrical & Sabattier Associés
Président de l’APASP

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