Le syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne (SIAAP) a créé une société d’économie mixte à opération unique (SEMOP) pour l’exploitation d’une des usines d’épuration et a lancé pour cela une procédure de mise en concurrence aux fins de sélectionner l’opérateur économique futur actionnaire de cette structure.
Saisi par le Préfet, le tribunal administratif de Paris a suspendu l’exécution du marché, la Cour Administrative d’Appel ayant fait de même. En tant que juge de Cassation, le Conseil d’Etat - tout en validant la méthode de notation du syndicat pour choisir l’opérateur, qui avait été contestée par un candidat évincé - a pris une importante décision sur le régime de préparation et de mise en œuvre des SEMOP, à une époque où les projets relatifs à ce type de structure semblent se multiplier.
Il s’agit d’une des problématiques les plus importantes traitées dans le cadre du groupe de travail animé par le Conseil d’Etat à la fin des années 2000 sur le Partenariat Public Privé Institutionnel, qui s’est traduit par un avis donné dans le cadre de son rapport annuel pour l’année 2010. En effet, la procédure de passation du marché public ou de la concession avec le futur actionnaire public est déconnectée de la constitution de la SEMOP, la question se posant donc du moment de l’établissement de la nécessaire connexion entre les deux. Dans son avis précité, le Conseil d’Etat avait fait référence au mécanisme de la cession du contrat, ce dernier devant être signé par le lauréat de la procédure lancée avant qu’il ne le cède à la SEMOP constituée en respectant le cadre juridique fixé dans un autre de ses avis, justement relatif à cette question, en date du 8 juin 2000. On sait que ce n’est pas la procédure retenue par les textes, l’article L.1541-2 - VI du CGCT prévoyant que le contrat « est conclu entre la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales et la société d’économie mixte à opération unique, qui est substituée au candidat sélectionné pour l’application des modalités de passation prévues selon la nature du contrat ». Après avoir rappelé une telle règle, le Conseil d’Etat constate cependant que le contrat en cause a été signé entre le SIAAP et la société Veolia, en sa qualité d’actionnaire de la SEMOP choisi à l’issue de la procédure de mise en concurrence. Or, à la date de signature, les statuts et le pacte d ‘actionnaires de la société n’étaient ni arrêtés ni publiés, ladite société se trouvant donc dépourvue d’existence juridique. Elle n’était donc pas en capacité de signer le marché, d’où la solution d’urgence retenue par le syndicat. Mais à peine plus de deux mois après la signature litigieuse, la SEMOP a été immatriculée et une convention tripartite signée entre elle, le SIAAP et Veolia a permis de régulariser la signature du contrat. Faisant preuve de réalisme, le Conseil d’Etat accepte cette régularisation, le vice de signature ainsi soulevé n’étant pas « d’une gravité telle qu’il ne puisse par principe être régularisé ».
Sans remettre en cause la règle selon laquelle le contrat doit être signé par la SEMOP, le Conseil d’Etat adopte donc une position souple qui préserve les intérêts de la procédure de constitution de cette structure et donc de ses acteurs.
L’article L.1541-2 du CGCT précité précise que l’avis d’appel public à la concurrence lancé pour choisir le futur actionnaire de la SEMOP doit comporter un document de préfiguration, contenant des éléments comme la répartition du capital et les règles de gouvernance entre les actionnaires ou le cout prévisionnel de l'opération projetée. La question soulevée devant le Conseil d’Etat portait cette fois sur le degré de précision de ce document ainsi que des statuts et du pacte d’actionnaires au stade de la procédure de passation du marché ou de la concession, et sur la marge de manœuvre des actionnaires de la SEMOP d’adapter ces documents une fois cette dernière régulièrement constituée. Là encore, le juge fait preuve de souplesse en rappelant que les dispositions du CGCT « n’imposent pas à la personne publique qui entreprend de constituer une société d’économie mixte à opération unique de fixer par avance de manière intangible dès le stade de la mise en concurrence tous les éléments du statut de la SEMOP et du pacte d’actionnaires ». Et dès lors que le document de préfiguration mentionnait la part de capital amenée à être détenue par le SIAAP dans la société et que les projets de statuts et de pacte d’actionnaires, auxquels renvoyait le document de préfiguration, indiquaient eux les règles de gouvernance de la structure, ses modalités de contrôle par le SIAAP ainsi que les règle de dévolution de l’actif et du passif de la société lors de sa dissolution, l’essentiel des éléments fixés par le CGCT était bien présents; quitte à ce chacun de ces éléments soient ensuite développés et complétés par les actionnaires de la structure.
Pleines de bon sens, de telles solutions ne peuvent être que bien accueillies par les collectivités territoriales souhaitant se lancer dans l’aventure de la SEMOP, voire de la SEMAOP, et qui sont quelquefois amenées à reculer face à la complexité et à la lourdeur de leur procédure de constitution.
Jean-Marc PEYRICAL
Avocat à la Cour
Président de l’APASP, Association Pour l’Achat dans les Services Publics
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