En ouverture de l'exposition "Champs-Elysées, Histoire et Perspectives", l'architecte Philippe Chiambaretta s'est prêté au jeu de la visite guidée, au long d'un parcours qui a été celui de sa réflexion pendant 18 mois : de la naissance d'un axe symbolique à une vision inclusive et durable pour 2030, en passant par le désamour actuel des Parisiens pour la plus belle avenue du monde. Le tableau est éloquent. Reste à passionner élus et citoyens.
Perspective de projet depuis l'Etoile - PCA-Stream
Le projet de réaménagement des Champs-Elysées émerge d'un contexte assez particulier, dans lequel une association loi 1901, le Comité pour les Champs-Elysées, œuvrant pour le rayonnement des institutions culturelles et des commerces installés sur l'avenue, s'est auto-saisie d'une mission d'intérêt général, en tant qu'opération ayant trait au domaine public.
Qui plus est, l'ambition est toute tournée vers les Parisiens. Il est temps de "rendre la ville à nouveau désirable", proclame Philippe Chiambaretta, à la tête de l'agence PCA-Stream, chargée de réaliser une première étude dont le diagnostic est sévère. Si, pour Jean-Noël Reinhardt, président du Comité, les Champs-Elysées souffrent d'un "lent déclassement", l'architecte y voit lui le sceau de "l'anthropocène" et de ses dérives urbaines.
Pour expliquer le déclin des Champs-Elysées, il faut revenir sur leur histoire réelle et fantasmée. Philippe Chiambaretta établit un parallèle entre le progressif aménagement de l'avenue et le développement de la philosophie rationnelle occidentale, qui s'exprime par la domestication de la nature et la géométrisation de l'espace. "Les Champs-Elysées sont un peu le kilomètre zéro des temps modernes", pressent-il. Locomotive de l'urbanisation planifiée de Haussmann, les Champs vont ensuite s'entourer de tout un quartier viabilisé. Avant de devenir vitrine de l’ère contemporaine avec ses cinémas et ses voitures.
Aujourd'hui, la plus belle avenue du monde n'est plus. Certes, elle attire toujours 100 000 visiteurs par jour dont 70% de touristes. Mais l'analyse des données téléphoniques indique que les Parisiens n'y viennent plus. 30% d'entre eux en ont une mauvaise image. Ces données croisées n'ont rien de paradoxales quand on pense que le sur-tourisme a causé dans beaucoup de métropoles des phénomènes de rejet.
Auxquels s'ajoutent ici d'autres motifs : d'abord, un intense trafic de transit, générant une pollution de l'air et une nuisance sonore, amplifiée par le revêtement en pavés. Citons aussi la vocation profondément tertiaire et commerciale de l'avenue, réservée à des investisseurs fortunés, avec des prix dépassant de 6,5 fois la moyenne parisienne. Une concentration de richesses susceptible d'exclure. Philippe Chiambaretta rappelle le récent mouvement des gilets jaunes dont les rassemblements sur les Champs s'apparentent à une réappropriation d'un espace interdit aux couches populaires.
En outre, seuls 2% des Parisiens interrogés estiment que l'avenue est verte et paisible. Du côté de la Concorde, elle comprend pourtant une vingtaine d'hectares de jardins publics. L'analyse de terrain fait état de parcs déserts. A titre de comparaison, le parc Monceau, trois fois plus petit, attire 40 fois plus de visiteurs. Morcellement des concessions et axes routiers barrant les traversées d'un parc à l'autre empêchent les jardins des Champs-Elysées de fonctionner comme un tout.
Exemple de la désaffection des Parisiens, ces jardins le sont aussi d'un fonctionnement trop sectorialisé, au goût de Philippe Chiambaretta. Sa vision 2030 combat justement les approches en silo. "L'anthropocène, la grande accélération des villes en termes démographiques, impose d'agir par transdisciplinarité." Pour cela, un outil : le CityScope. Créé par le Media Lab du MIT, il représente en 3D la santé d'un tissu urbain en intégrant un ensemble de paramètres, répartis en trois grandes catégories que sont les mobilités, les usages et la nature.
Philippe Chiambaretta file la métaphore de la médecine, un domaine dont il loue l'avancement technologique, alors que l'urbanisme en est, selon lui, "au temps de Molière". Mal instrumenté et fragmenté, on ne pourra pas s'attaquer à ce "duty free à ciel ouvert", à cet "hyper-lieu", terme emprunté au géographe Michel Lussault, pour décrire des espaces où se concentrent des dysfonctionnements liés à la mondialisation.
Sa vision 2030 témoigne en effet d'une opération radicale : piétonnisation de la place de la Concorde, suppression de voies automobiles sur l'avenue, triplement de la surface végétalisée, ... "Rien n'est de l'ordre du design architectural", précise Philippe Chiambaretta. Il s'agit plutôt de suggérer "une ville plus durable, plus inclusive, plus désirable". Néanmoins, le coût global du projet est déjà chiffré à 150 millions d'euros.
Bien que les cinq principaux candidats à la mairie de Paris se soient montrés à l'écoute, ce montant dépasse de loin les capacités d'investissement de la puissance publique. Confiant dans les possibilités de financements innovants, le Comité des Champs-Elysées propose un partenariat public privé, existant déjà de facto, étant donné que les entreprises-adhérentes ont déjà commandité l'étude de PCA-Stream pour un million d'euros au total.
Le projet cherche aussi à se faire adopter des citoyens. Au long des trois mois de l'exposition "Champs-Elysées, Histoire et Perspectives", une consultation, sous forme de questionnaire en ligne, sera réalisée par Make.org, dans l'espace du Pavillon de l'Arsenal et sur un site dédié. Hasard du calendrier ? Celle-ci prendra fin lors de l'installation de la future équipe municipale. Si, comme l'espère le Comité, la consultation enregistre 100 000 réponses d'ici là, le projet de réaménagement des Champs-Elysées comptera un argument de plus à faire valoir auprès des élus.
Philippe Chiambaretta - Jimmy Delpire
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