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Le 29/05/2019 à 17h

Que faire d’une offre inacceptable ?

Les acheteurs publics sont souvent confrontés non pas seulement aux offres anormalement basses mais aux offres au contraire trop élevées au regard de leur estimation initiale.

Que faire d’une offre inacceptable ?

Un tel dérapage peut d’ailleurs résulter d’une estimation justement mal effectuée, d’un cahier des charges pas suffisamment adapté à la réalité économique du marché ou encore à une concurrence insuffisante dont pourrait profiter un opérateur donné.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les acheteurs publics disposent de plusieurs solutions pour gérer ces offres inacceptables, et ce même dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres.

L’offre dite inacceptable

En vertu de l’article L.2152-3 du Code de la Commande Publique, une offre inacceptable est une offre « dont le prix excède les crédits budgétaires alloués au marché, déterminés et établis avant le lancement de la procédure ». Une offre inacceptable doit donc être distinguée d’une offre irrégulière (qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation) ainsi que d’une offre inappropriée (offre sans rapport avec le marché).

Une offre ne peut cependant être automatiquement déclarée inacceptable au seul motif que son prix est supérieur au montant estimé du marché. Ainsi, si une offre ne correspond pas au budget annuel de l’acheteur, celui-ci peut toujours être en mesure de la financer et donc lui attribuer le marché (CE, 24 juin 2011 OPH de l’Essonne, du Val d’Oise et des Yvelines, Req 346665 ; réponse du Ministère de l’Economie et des Finances, JO Sénat 21 septembre 2016, pages 40-58).

Quelle marge de négociation ?

Selon l’article R.2152-1 du Code de la commande Publique, les offres trop chères et donc inacceptables ne peuvent devenir acceptables que si elles peuvent faire l’objet de négociations ou de discussions. On pourrait donc penser que cela ne peut être le cas dans des procédures comme le MAPA sans négociation ou l’appel d’offres où elles devraient être purement et simplement éliminées.

Mais, en application du Droit européen et plus particulièrement de l’article 26 de la directive 2014/ 24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics, les acheteurs publics peuvent cependant souscrire dans ce cas une procédure avec négociation. Ainsi, en vertu de l’article R. 2124-3 du Code de la Commande Publique, un pouvoir adjudicateur peut passer des marchés selon cette procédure lorsque, dans le cadre d’un appel d’offres, seules des offres irrégulières ou inacceptables ont été présentées. Et l’article précise que « le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu de publier un avis de marché s’il ne fait participer à la procédure que le ou les soumissionnaire (s) qui ont présentés des offres conformes aux exigences relatives aux délais et modalités formelles de l’appel d’offre ». Ainsi, si l’offre est régulière et correspond aux besoins et attentes figurants dans le cahier des charges, il apparait tout à fait possible de négocier avec l’opérateur qui en est à l’origine (ou avec les opérateurs s’ils sont plusieurs).

Le paradoxe est là : on ne se situe pas dans un cas de marché négocié sans publicité ni concurrence (articles R. 2122-1 à R.2122-9 du Code) mais de procédures avec négociation… sans publicité ni mise en concurrence préalables ; ce qui, peu ou prou revient en pratique globalement au même. Il reste qu’il s’agit, en l’espèce d’un nouveau marché, distinct de l’appel d’offres initial même s’il peut être passé sans formalités.

A noter que l’article R. 2124-3 du Code précise que les négociations ainsi menées ne peuvent conduire à ce que les conditions initiales du marché soient substantiellement modifiées.
En d’autres termes, les négociations en cause ne devront ni modifier de manière trop importante le cahier des charges initial du marché ni conduire à une évolution trop marquée de son objet, de son périmètre ou encore de son prix ; ce qui est bien évidemment le cas au titre de toute négociation dans les marchés publics.

Jean-Marc PEYRICAL
Avocat Associé, Cabinet Peyrical et Sabattier Associés
Président de l’APASP

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