En cette période de fêtes de fin d’année, on est toujours tenté de faire des bilans mais aussi des souhaits et vœux pour les temps à venir. Les acheteurs publics ne devraient pas déroger à la tradition. De la finalisation de la transposition des directives de 2014 à l’adoption le 9 décembre dernier de la loi sapin II, l’année 2016 a en effet été particulièrement riche pour eux. 2017 devrait voir encore accélérer leur professionnalisation et leur donner la possibilité de voir leur métier enfin reconnu à sa juste valeur par les structures publiques et parapubliques.
L’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et son décret d’application du 25 mars 2016 ont encore accru les moyens donnés aux acheteurs pour la passation de leurs contrats.
Possibilité de faire du sourcing, avènement des procédures négociées qui deviennent de vraies alternatives à l’appel d’offres, création du partenariat d’innovation, possibilité d’autoriser la régularisation des offres, maintien voire assouplissement des contrats globaux et notamment du marché global de performance et du marché de partenariat : la liste est longue, et pourrait même être complétée par les différentes possibilités de modifications des contrats en cours d’exécution que l’on pourrait qualifier d’avenants revisités. Si on ajoute à cela l’ordonnance du 29 janvier 2016 et son décret d’application 1er février 2016 relatifs aux concessions qui vont bien au-delà du périmètre des délégations de service public mais aussi la loi NOTRe du 7 aout 2015 qui instaure la société d’économie mixte d’aménagement à opération unique (SEMAOP), la liste s’allonge encore.
Cette SEMAOP est particulièrement intéressante dès qu’elle créée un nouveau type de pouvoir adjudicateur qui permet un partenariat entre l’Etat, les collectivités territoriales et les opérateurs économiques. Il en est de même d’ailleurs de la future société publique d’intérêt national (SPLIN) qui est intégrée dans le projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain en cours de discussion devant le parlement ; s’agissant la encore d’une nouvelle forme de coopération entre l’Etat et les acteurs publics locaux.
Cet enrichissement de la boite à outils dédiée aux acheteurs publics va mécaniquement accroitre leur liberté de choix et d’action. Afin d’assumer les responsabilités qui en découlent, ils devront s’organiser en conséquence mais aussi se former tant de manière initiale que continue afin d’atteindre le niveau de compétence requis par un tel défi. Cela sera par exemple le cas pour utiliser de manière efficiente le sourcing et éviter toute suspicion de favoritisme ou de conflits d’intérêt. Les acheteurs devront également faire preuve d’une ingénierie juridique de plus en plus poussée, pour faire par exemple œuvre d’anticipation et écrire dans leurs contrats de la façon la plus précise possible des dispositions relatives aux clauses de rencontres et de réexamen entre les parties. De nouveaux schémas devront par ailleurs être réinventés, notamment avec la disparition des BEA et AOT droits réels pour la réalisation d‘équipements d’intérêt général. Pourquoi ainsi ne pas mettre en place des baux à construction avec mise en concurrence préalable pour de tels équipements, dans la droite ligne de l’arrêt de la Cour administrative d’Appel de Marseille du 25 février 2010, commune de Rognes, qui a soumis à des obligations de publicité et de mise en concurrence un contrat qui échappait pourtant à la qualification de marché public ou de concession.
Plus de liberté signifie donc plus de risques et par la même d’insécurité pour les acheteurs. Ils peuvent néanmoins être quelque peu rassurés par l’évolution de la jurisprudence administrative, qui fait prévaloir la sécurité juridique sur le respect d’un formalisme aux conséquences souvent qualifiées d’excessives.
De l’arrêt du Conseil d’Etat Smirgeomes d’octobre 2008 à l’arrêt Tarn et Garonne d’avril 2014, les annulations de procédures et de contrats se font de plus en plus rares, au bonheur des acheteurs mais au grand dam des operateurs
Par contre, l’espoir né avec la préparation de la loi Sapin II sur l’assouplissement du délit de favoritisme a été éteint avec l’adoption de cette dernière, qui n’a rien modifié ou presque en la matière. Au contraire, la Cour de Cassation ne cesse d’en étendre le champ, ainsi qu’en témoigne sa décision du 17 février 2016 qu’il applique aux marchés soumis à l’ex-ordonnance du 6 juin 2005.
Le champ des contrats publics soumit à des procédures de transparence et de concurrence ne va cesser de prendre de l’ampleur. Au-delà de l’élargissement déjà évoqué de la sphère des concessions, on peut tout d’abord citer le cas des marchés publics de travaux, la disparition du critère de la maîtrise d’ouvrage dans leur définition devant mécaniquement intégrer dans leur périmètre des contrats qui y échappaient jusque-là, comme ceux portant cessions de droits à construire ou de biens du domaine privé (voir arrêt de la CAA de Marseille commune de Rognes précité justement relatif à la cession de biens du domaine privé d’une commune assortie d’une obligation de travaux) ou encore certaines Ventes en l’Etat de Futur Achèvement au sein desquelles l’acheteur public sera réputé exercer une influence déterminante. Et puis il y a cette fameuse décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 14 juillet 2016, PROMOIMPRESA SRL qui soumet à des procédures de transparence et donc de publicité préalable la délivrance des titres d’occupation domaniale. Il s’agit d’un premier pas important vers la remise en cause de la jurisprudence Jean Bouin du Conseil d’Etat du 25 décembre 2010 qui va évidemment renforcer le formalisme pesant sur les acheteurs dont la passation de leurs conventions d’occupation du domaine public.
Terminons à la fois ce bilan et ces prévisions par une note positive : l’article 34 de la loi Sapin II a habilité le gouvernement à procéder par ordonnance pour adopter la partie législative du code de la commande publique. Cette codification sera effectuée à droit constant, donc sans toucher aux textes existants, sous l’égide de la commission supérieure de la codification placée auprès du premier ministre. Le calendrier est serré, dès lors que le texte doit être adopté d’ici fin 2018. Il laisse en tout cas un grand espoir aux acheteurs et plus largement aux praticiens de la commande publique, qui critiquent depuis si longtemps – et fort justement – l’éparpillement des textes qui leur sont applicables. S’il y a bien un vœu qu’ils peuvent faire, c’est de voir 2017 permettre à la commission de la codification de bien avancer dans ses travaux afin de préparer pour 2018 l’avènement de ce texte tant attendu.
Jean-Marc Peyrical
Maître de conférences des Universités
Avocat associé
Président de l’APASP
Directeur scientifique du Cercle Colbert
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